S'afficher opposé à l'air du temps est toujours chose risquée. A s'y opposer, le salarié y perd son emploi, ou est placardisé, l'homme politique y joue ses mandats, monsieur tout le monde est pris pour un "has been".
Sous la pression de l'air du temps, on a mis en oeuvre l'énergie atomique, puis on en a neutralisé voire réduit les capacités. On a assisté sans réagir à la fermeture des usines pour cause de faillites ou de délocalisation. On a privilégié l'actionnaire au travailleur, et accepté les plans sociaux, même concomitants à des distributions élevées de dividendes.
On doit s'inquiéter de l'air du temps d'aujourd'hui, car il repose non sur l'espoir, mais sur la peur. La peur que la planète devienne invivable, que les animaux en disparaissent, que l'agriculture ne produise plus que des produits nocifs sur des terres surexploitées et appelées à devenir stériles. Alors que les années passées étaient celles de l'ouverture au monde, d' une tendance à la minimisation des frontières, l'air d'aujourd'hui est au repli sur soi, son pays, sa ville ou son village, sa famille. L'écologisme prend la place des religions pour fixer le bien et le mal, l'interdit et le permis, et certains propos ne sont pas si éloignés de ceux des inquisiteurs d'autrefois.
Il vaut mieux s'afficher en fumant un joint qu'en dévorant un steak, et taire que, curieux du monde, on est prêt à prendre l'avion pour le découvrir. C'est paraître idiot que de vouloir ne serait-ce que nuancer des affirmations péremptoires sur le dérèglement climatique, qu'on met à toutes les sauces pour expliquer tout et son contraire.
Mais l'air du temps a une fin. Un homme, un livre ou une nouvelle théorie, une épidémie ou une guerre, une catastrophe naturelle, et on passe à l'air du temps suivant. Tous ajoutés, cela fait l'Histoire, dont les historiens s'attacheront à chercher le sens!