Personne ne conteste plus que le libre-échange a ses limites, et que le gagnant-gagnant y est une chimère. Mais personne ne peut nier non plus que les pays déjà cités ont mieux que nous tiré leur épingle du jeu.
Moins de goût pour les grands espaces, on l'a dit. Aussi parce que la France a été plus sensibilisée à la financiarisation que d'autres. Nos présidents et dirigeants frais émoulus des grandes écoles de gestion, publique ou privé, venus trop souvent des cabinets ministériels, ont remplacé ceux venus des grandes écoles d'ingénieurs, plus à même d'asseoir la santé de l'entreprise sur le couple produit-marché que sur le contrôle de gestion et les résultats financiers. Sous leur coupe, le court terme est passé devant le moyen et long terme, la distribution de dividendes et de bonus est devenu l'objectif privilégié.
Quant à nos jeunes créateurs, s'il y a pas mal d'esprits inventifs et de start-ups, on n'a pas eu en France notre Bill Gates ou Steve Jobs, ni de Jeff Bezos ou Mark Zuckerberg. Nos créateurs font un petit tour et puis s'en vont. Ceux qui réussissent s'introduisent en bourse ou se vendent à un grand groupe. Ils deviendront rentiers et business angels, on aime en France les donneurs de leçons, et leur boite disparaîtra subrepticement, noyée dans le fatras de la galaxie que constituent les filiales des grands groupes. Au mieux, ceux-ci récupèreront un brevet ou quelques cadres ingénieux, au pire, ils feront purement et simplement disparaître un concurrent et un empêcheur de profiter en rond.
Que va devenir la banque Nickel, vendue tout récemment à BNPP, prototype de la banque institutionnelle?
Si en France on sait faire des affaires, on est en déficit de mentalité industrielle. Il ne s'agit pas seulement de s'implanter sur un marché nouveau ou en développement, il faut savoir durer, et péréniser son entreprise.