Est-ce pour autant que la France est passée à droite, voire extrême droite ?
Ces élections ne sont pas un vote d'adhésion aux idées et au programme du Front National. Car de programme il n'en a guère, et de débat d'idées il n'y a pas eu, même sur les points les plus forts soulevés par le FN, comme la sortie de la France de l'euro ou l'augmentation de 200€ du smic. Deux sujets fondamentaux, qui mériteraient des explications et une confrontation. Malin est celui qui pourra nous dire quelle solution miracle préconise le Front National sur tous les sujets qui préoccupent les français, chômage, sécurité, migrants et réfugiés.
Ce vote massif en faveur du FN s'analyse plutôt comme un vote de ras-le-bol envers les politiques qui nous gouvernent ou nous ont gouvernés, et qui sont perçus comme ayant échoué à changer le cours des choses.
Depuis 40 ans, le chômage monte inexorablement, touchant toutes les populations, tous les âges, tous les sexes, sans qu'une embellie puisse être envisagée.
L'intégration des populations de l'immigration est trop souvent en panne, débouchant sur des ghettos où les trafics sont devenus la solution de survie et où la sécurité n'est plus assurée. Enfermés dans les lambris de la république, nos bourgeois au pouvoir de droite comme de gauche ont laissé faire, ne se mobilisant sue le sujet qu'à l'occasion d'explosions de violence içi ou là.
Le pouvoir d'achat de ceux qui ont la chance d'obtenir ou conserver un boulot est en berne. Depuis des années, les augmentations de salaires ne concernent plus que les élites dirigeantes et les cadres supérieurs, et le confort des actionnaires est privilégié par rapport à celui des salariés, pourtant producteurs de la richesse première de l'entreprise. L'obsession du profit a déshumanisé l'entreprise, rabaissé à un simple matricule le salarié moyen, jetable quand on veut, perçu comme une source de coût avant de l'être comme une richesse. A l'objectif de sécurité de l'emploi, s'est substitué la précarisation, génératrice d'insécurité, de peur, d'interdiction de penser à long terme. Le corollaire du profit, la productivité, fait peser sur le dos des salariés une pression de plus en plus douloureuse, le plus souvent récompensée par la seule conservation de son emploi.
Ces trois sujets conditionnent la vie des gens. Or le politique a montré qu'il n'avait de prise sur aucun.
La police a renoncé à la sécurité dans les banlieues dites sensibles, dont le seul avenir est la ghettoïsation. Le pouvoir politique est impuissant face à l'afflux de migrants et réfugiés, on a démolli le refuge de Calais, à la place s'est construit un immense bidonville. Les grandes entreprises n'ont pas de contre-pouvoir, elles sont maîtresses des salaires, de l'emploi, des investissements et désinvestissements. Le plus bel exemple en est la fermeture des usins PSA à Aulnay. Tout le monde politique était contre, PSA l'a fait quand même.
Ainsi face aux problèmes les plus criants des français, le monde politique n'a su répondre que par des voeux pieux, des déclarations de bonnes intentions. Nul ne se pose la question de savoir si le FN a les idées, les hommes, pour apporter les réponses qui changeraient vraiment la vie. Ca n'est pas le sujet. On ne croit plus en l'UMPS, on vote donc pour le parti qui ne s'est pas encore corrompu à l'exercice du pouvoir.
C'est la foi du charbonnier, un pari hautement risqué, aventureux, que d'aucuns pourraient amèrement regretter. Ce n'est pas tant la faillite des décisions et choix des politiques qui est en cause, que leur perpétuel mensonge et démagogie qui a voulu laisser croire aux français que demain, avec eux, on pouvait raser gratis.
La démagogie est le grand risque de la démocratie. On est en train de le vivre.