Certains diront que le système est bon, et que cette course aux profits et dividendes est gage d'efficacité, à défaut de créer de la justice.
Peut-on en être si sûr? Il y a quarante ans, le marché bancaire français était accaparé par les trois banques dites inscrites, BNPP, CL, SG. Privatisées, cotées, intégrant stock-options et actions gratuites pour motiver les troupes, distribuant de larges dividendes (même en situation de pertes pour la SG) pour plaire aux analystes, nos trois vieilles, le regard fixé sur le compte d'exploitation, ont inexorablement perdu des parts de marché. Hier dominantes sur le marché des particuliers et des pros, elles sont aujourd'hui marginalisées par les banques mutualistes qui accaparent 80% du marché. Sans le poids de leurs clients grandes entreprises, les banques capitalistes seraient réduites à un rôle marginal.
Il faut en finir avec l'actionnaire roi du monde, qui impose son implacable loi du profit au monde entier. Cette exigence radicale amène malheur au travail, perte de sens, destruction de l'environnement, exploitation de la main d'oeuvre, indifférence ou hostilité à tout ce qui ne va pas dans le sens souhaité.
Dans ses excès, le capitalisme conduit le monde à sa perte. Il est temps que les Etats s'entendent sur le respect de règles déontologiques limitant le pouvoir de ces fonds au seul droit de recevoir des dividendes. Il est temps d'introduire dans les entreprises cotées un vrai contre-pouvoir aux actionnaires en établissant un pouvoir des salariés, qui sont et font la richesse de l'entreprise.
La démocratie ne doit pas se résumer à élire tous les quatre ou cinq ans des dirigeants politiques aux pouvoirs limités, mais doit s'étendre aux entreprises par un accès au pouvoir des salariés qui y consacrent tout leur temps et en ont la connaissance.
On en est loin, et le sujet est peu évoqué. Mais rien ne changera dans le monde si on n'ose pas remettre en cause ce pouvoir exorbitant de l'actionnaire des grandes entreprises.